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l’hypocrite. L’homme évangélique a été un adversaire de la théologie pédante, de la morgue hiérarchique, de l’esprit ecclésiastique tel que les siècles l’ont fait. Le moyen âge l’a brûlé. De nos jours, la grande invective du vingt-troisième chapitre de saint Matthieu contre les pharisiens est encore la sanglante satire de ceux qui se couvrent du nom de Jésus et que Jésus, s’il revenait au monde, poursuivrait de ses fouets.

Où l’Évangile selon saint Matthieu fut-il écrit ? Tout semble indiquer que ce fut en Syrie, pour un cercle juif, qui ne savait guère que le grec, mais qui avait quelque idée de l’hébreu[1]. L’auteur se sert d’originaux évangéliques écrits en hébreu ; or il est douteux que les originaux hébreux des textes évangéliques soient jamais sortis de Syrie. Dans cinq ou six cas, Marc avait conservé des petites phrases araméennes prononcées par Jésus ; le prétendu Matthieu les efface toutes, excepté une seule. Le caractère des traditions propres à notre évangéliste est essentiellement galiléen. Selon lui, toutes les apparitions de Jésus ressuscité ont lieu en Galilée[2]. Ses premiers lecteurs semblent avoir dû être des Syriens. Il n’a

  1. Matth., i, 23 ; xv, 5 (comp. Marc, vii, 11) ; xvii, 46. Σώζειν ἀπὸ τῶν ἀμαρτιῶν (Matth., i, 21) est bien peu hébreu.
  2. Matth., xxviii, 16 et suiv.