Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/258

Cette page a été validée par deux contributeurs.

siens est prédit d’une façon vague, qui nous reporte avant la révolution de Judée[1].

De tout cela résulte un Évangile infiniment supérieur pour la beauté à celui de Marc, mais d’une valeur historique beaucoup moindre. Marc reste, pour les faits, le seul document authentique de la vie de Jésus. Les récits que pseudo-Matthieu ajoute à ceux de Marc ne sont que légende ; les modifications qu’il apporte aux récits de Marc ne sont que des façons de dissimuler certains embarras. L’assimilation des éléments que l’auteur puise hors de Marc est faite de la manière la plus grossière ; la digestion, si on peut s’exprimer ainsi, n’est pas achevée ; les morceaux sont restés entiers, et on peut les reconnaître. Sous ce rapport, Luc introduira de très-grands perfectionnements. Mais ce qui fait le prix de l’ouvrage attribué à Matthieu, ce sont les discours de Jésus, conservés avec une fidélité extrême, et probablement dans l’ordre relatif où ils furent d’abord écrits.

Cela était plus important que l’exactitude biographique, et l’Évangile de Matthieu, tout bien pesé, est le livre le plus important du christianisme, le livre

  1. Le discours entier, surtout les versets 2, 3, 5, 15, 16, 18, 21, 23, 27, 29, 34, supposent l’organisation de la nation encore intacte.