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se dessinaient ; mais, comme tous les deux répondaient à des besoins de la conscience chrétienne, on les conciliait tant bien que mal. D’une part, il fallait que Jésus fût descendant de David[1] ; de l’autre, on ne voulait pas que Jésus eût été conçu dans les conditions ordinaires de l’humanité. Il n’était pas naturel que celui qui n’avait pas vécu comme les autres hommes fût né comme les autres hommes. La descendance de David s’établissait par une généalogie où Joseph était rattaché à la souche davidique. Joseph était père de Jésus[2] ; pour rattacher Jésus à David, il s’agissait donc simplement d’y rattacher Joseph. Cela n’était guère satisfaisant dans l’hypothèse de la conception surnaturelle, Joseph et ses ascendants supposés n’ayant dans une telle hypothèse contribué en rien à la naissance de Jésus. C’est Marie qu’il aurait fallu rattacher à la famille royale ; or aucune tentative ne fut faite au ier siècle pour cela[3], sans

  1. Rom., i, 3 ; Apoc., v, 5 ; Act., ii, 30. Cf. Talm. de Jér., Sanhédrin, 43 a.
  2. Luc (iii, 23) atténue la difficulté par son ὡς ἐνομίζετο. Cérinthe et Carpocrate étaient ici parfaitement logiques. Épiph., hær. xxx, 14. Peut-être la rédaction du v. 16 du premier chapitre de Matthieu était-elle plus précise dans l’Évangile nazaréen dont se servaient Cérinthe et Carpocrate. Voir Hilgenfeld, p. 15, 19.
  3. Les passages Luc, i, 27, et ii, 4, impliquent même l’opinion contraire. La logique reprit ses droits au iie siècle ; on crée alors, ou du moins l’on suppose à Marie une descendance davidique.