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contre de grossières provocations, qui ne se produisaient que grâce à la bonté et à la simplicité de cet excellent souverain. Les philosophes croyaient de la meilleure foi du monde, avec leurs petites allusions littéraires[1], défendre la dignité de la nature humaine ; ils ne voyaient pas qu’ils ne défendaient en réalité que le privilège d’une aristocratie, et qu’ils préparaient le règne féroce de Domitien. Ils voulaient l’impossible, une république municipale, gouvernant le monde, un esprit public dans un immense empire, composé des races les plus diverses, les plus inégales. Leur folie était presque aussi grande que celle des écervelés que nous avons vus de nos jours rêver Paris commune libre au milieu d’une France que Paris a formée à la monarchie. Aussi les bons esprits du temps, Tacite, les deux Plines, Quintilien, virent-ils bien la vanité de cette école politique. Tout en étant pleins de respect pour les Helvidius Priscus, les Rusticus, les Sénécion, ils abandonnèrent la chimère républicaine. Ne cherchant plus qu’à améliorer le principat, ils en tirèrent les plus beaux fruits durant près d’un siècle.

Hélas ! le principat avait un défaut capital, c’était de flotter déplorablement entre la dictature élective

  1. Voyez Dialogue des orateurs c. 2, 10.