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seule respectable et de traiter tous les convertis en intrus. Des prétentions analogues à celles des Alides dans l’islam se fussent produites. L’islamisme eût certainement péri sous les embarras causés par la famille du Prophète, si le résultat des luttes du ier siècle de l’hégire n’eût été de rejeter sur un second plan tous ceux qui avaient tenu de trop près à la personne du fondateur. Les vrais héritiers d’un grand homme sont ceux qui continuent son œuvre, et non ses parents selon le sang. Considérant la tradition de Jésus comme sa propriété, la petite coterie des nazaréens l’eût sûrement étouffée. Heureusement ce cercle étroit disparut de bonne heure ; les parents de Jésus furent bientôt oubliés au fond du Hauran. Ils perdirent toute importance et laissèrent Jésus à sa vraie famille, à la seule qu’il ait reconnue, à ceux qui « entendent la parole de Dieu et qui la gardent »[1]. Beaucoup de traits des Évangiles, où la famille de Jésus est présentée sous un jour défavorable[2], peuvent venir de l’antipathie que les prétentions nobiliaires des desposyni ne manquèrent pas de provoquer autour d’eux.

  1. Luc, xi, 28.
  2. Voir Vie de Jésus, p. 139, 160.