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temps à Alexandrie, auprès de Tibère Alexandre. Il ne revint à Rome que vers le mois de juillet[1] de l’année 70, peu avant la ruine totale de Jérusalem. Titus, au lieu de pousser la guerre de Judée, avait suivi son père en Égypte ; il resta auprès de lui jusque vers les premiers jours de mars.

Les luttes dans Jérusalem ne faisaient que s’aggraver. Les mouvements fanatiques sont loin d’exclure chez ceux qui s’en font les acteurs la haine, la jalousie, la défiance ; associés ensemble, des hommes très-convaincus et très-passionnés se suspectent d’ordinaire, et c’est là une force ; car la suspicion réciproque crée entre eux la terreur, les lie comme par une chaîne de fer, empêche les défections, les moments de faiblesse. C’est la politique artificielle et sans conviction qui procède avec les apparences de la concorde et de la civilité. L’intérêt crée la coterie ; les principes créent la division, inspirent la tentation de décimer, d’expulser, de tuer ses ennemis. Ceux qui jugent les choses humaines avec des idées bourgeoises croient que la révolution est perdue quand les révolutionnaires « se mangent les uns les autres ». C’est là, au contraire, une preuve que la révolution a toute son énergie, qu’une ardeur impersonnelle y préside. — On ne vit jamais cela plus clai-

  1. Voir Tillemont, note 7 sur Vesp.