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ce qu’elles sont de nos jours, un ouvrage pouvait appartenir à un auteur de bien des manières. L’apôtre Jean a-t-il écrit lui-même le manifeste de l’an 69 ? On en peut certes douter. Il suffit pour notre thèse qu’il en ait eu connaissance, et que, l’ayant approuvé, il l’ait vu sans déplaisir circuler sous son nom. Les trois premiers versets du chapitre Ier, qui ont l’air d’une autre main que celle du Voyant, s’expliqueraient alors. Par là s’expliqueraient aussi des passages comme xviii, 20 ; xxi, 14, qui inclinent à croire que celui qui tenait la plume n’était pas apôtre. Dans Eph., ii, 20, nous trouvons un trait analogue, et là nous sommes sûrs qu’entre Paul et nous il y a l’intermédiaire d’un secrétaire ou d’un imitateur. L’abus qui a été fait du nom des apôtres pour donner de la valeur à des écrits apocryphes[1] doit nous rendre très-soupçonneux. Beaucoup de traits de l’Apocalypse ne conviennent pas à un disciple immédiat de Jésus[2]. On est surpris de voir un des membres du comité intime où s’élabora l’Évangile nous présenter son ancien ami comme un Messie de gloire, assis sur le trône de

  1. Aux preuves tant de fois alléguées, ajoutez Caïus et Denys d’Alexandrie, dans Eusèbe, H. E., III, 28.
  2. Le verset Apoc., i, 2, ne signifie pas que l’auteur ait été témoin de la vie de Jésus. Comp. i, 9, 19, 20 ; vi, 9 ; xx, 4 ; xxii, 8.