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voir de maîtriser les forces du monde, ou bien la terre, expérience manquée entre tant de millions d’autres, se glacera-t-elle avant que le problème qui tuera la mort ait été résolu ? Nous l’ignorons. Mais, avec le Voyant de Patmos, au delà des alternatives changeantes, nous découvrons l’idéal, et nous affirmons que l’idéal sera réalisé un jour. À travers les nuages d’un univers à l’état d’embryon, nous apercevons les lois du progrès de la vie, la conscience de l’être s’agrandissant sans cesse, et la possibilité d’un état où tous seront dans un être définitif (Dieu) ce que les innombrables bourgeons de l’arbre sont dans l’arbre, ce que les myriades de cellules de l’être vivant sont dans l’être vivant, — d’un état, dis-je, où la vie du tout sera complète, et où les individus qui auront été revivront en la vie de Dieu, verront, jouiront en lui, chanteront en lui un éternel Alleluia. Quelle que soit la forme sous laquelle chacun de nous conçoit cet avènement futur de l’absolu, l’Apocalypse ne peut manquer de nous plaire. Elle exprime symboliquement cette pensée fondamentale que Dieu est, mais surtout qu’il sera. Le trait y est lourd, le contour mesquin ; c’est le crayon grossier d’un enfant traçant avec un outil qu’il ne sait point manier le dessin d’une ville qu’il n’a point vue. Sa naïve peinture de la cité de Dieu, grand joujou d’or et de perles,