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à d’habiles contre-sens, un livre qui renferme d’atroces injures contre Paul s’est conservé à côté des œuvres mêmes de Paul, et forme avec celles-ci un volume censé provenir d’une seule inspiration.

Cette protestation persistante, qui constitue un fait si important de l’histoire ecclésiastique, est-elle d’un poids bien considérable aux yeux de la critique indépendante ? On ne saurait le dire. Certainement Denys d’Alexandrie est dans le vrai, quand il établit que le même homme n’a pas pu écrire le quatrième Évangile et l’Apocalypse. Mais, placée devant ce dilemme, la critique moderne a répondu tout autrement que la critique du IIIe siècle. L’authenticité de l’Apocalypse lui a paru bien plus admissible que celle de l’Évangile, et si, dans l’œuvre johannique, il faut faire une part à ce problématique Presbyteros Johannes, c’est bien moins l’Apocalypse que l’Évangile et les épîtres qu’il conviendrait de lui attribuer. Quel motif eurent, au IIIe siècle, ces adversaires du montanisme, au IVe siècle, ces chrétiens élevés dans les écoles helléniques d’Alexandrie, de Césarée, d’Antioche, pour nier que l’auteur de l’Apocalypse fût réellement l’apôtre Jean ? Une tradition, un souvenir conservé dans les Églises ? En aucune façon. Leurs motifs étaient des motifs de théologie a priori. D’abord, l’attribution de l’Apocalypse à l’apôtre rendait