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Il est probable cependant que la douceur de ces bons sectaires et leur caractère inoffensif les préservèrent souvent. La plupart des chrétiens des villes syriennes étaient ce qu’on appelait des « judaïsants[1] », c’est-à-dire des gens du pays convertis, non des Juifs de race. On les regardait avec défiance ; mais on n’osait les tuer ; on les considérait comme des espèces de métis, étrangers à leur patrie[2]. Quant à eux, en traversant ces mois terribles, ils avaient l’œil au ciel, croyant voir dans chaque épisode de l’effroyable orage les signes du temps fixé pour la catastrophe : « Prenez comparaison du figuier : quand ses pousses deviennent tendres et que ses feuilles naissent, vous en concluez que l’été est proche ; de même, quand vous verrez ces choses arriver, sachez qu’Il est proche, qu’Il est à la porte[3] ! »

L’autorité romaine se préparait cependant à rentrer par la force dans la ville qu’elle avait imprudemment abandonnée. Le légat impérial de Syrie, Cestius Gallus, marchait d’Antioche vers le sud avec une armée considérable. Agrippa se joignit à lui comme

  1. Jos., B. J., II, xviii, 2.
  2. Cette phrase importante paraît un peu altérée dans Josèphe : τοὺς ἰουδαΐζοντας εἶχον ἐν ὑποψίᾳ, καὶ τὸ παρ’ἑκάστοις ἀμφίϐολον οὔτε ἀνελεῖν τις προχείρως ὑπέμενε καὶ μεμιγμένον ὡς βεϐαίως ἀλλόφυλον ἐφοϐεῖτο.
  3. Matth., xxiv, 32-33.