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respect comme devant tout ce qui est mystérieux.

Les causes de cette crise étaient anciennes, et la crise elle-même était inévitable. La loi mosaïque, œuvre d’utopistes exaltés, possédés d’un puissant idéal socialiste, les moins politiques des hommes, était, comme l’islam, exclusive d’une société civile parallèle à la société religieuse. Cette loi, qui semble être arrivée à l’état de rédaction où nous la lisons au VIIe siècle avant J.-C, aurait, même indépendamment de la conquête assyrienne, fait voler en éclats le petit royaume des descendants de David. Depuis la prépondérance prise par l’élément prophétique, le royaume de Juda, brouillé avec tous ses voisins, pris d’une rage permanente contre Tyr, en haine avec Édom, Moab et Ammon, n’était plus capable de vivre. Une nation qui se voue aux problèmes religieux et sociaux se perd en politique. Le jour où Israël devint « un pécule de Dieu, un royaume de prêtres, une nation sainte[1] », il fut écrit qu’il ne serait pas un peuple comme un autre. On ne cumule pas des destinées contradictoires ; on expie toujours une excellence par quelque abaissement.

L’empire achéménide mit Israël un peu en repos. Cette grande féodalité tolérante pour toutes les diver-

  1. Exode, xix, 5-6.