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sortir du monde, « car nous n’y avons point de cité permanente, nous cherchons celle qui est à venir » ; obéir aux chefs ecclésiastiques, être pour eux pleins de respect, rendre leur tâche facile et agréable, « puisqu’ils veillent sur les âmes et doivent en rendre compte », voilà pour la pratique. Aucun écrit ne montre peut-être mieux que celui-ci le rôle mystique de Jésus grandissant et finissant par remplir uniquement la conscience chrétienne. Non-seulement Jésus est le Logos qui a créé le monde, mais son sang est l’universelle propitiation, le sceau d’une alliance nouvelle. L’auteur est si préoccupé de Jésus, qu’il fait des fautes de lecture pour le trouver partout. Dans son manuscrit grec[1] des Psaumes, les deux lettres ΤΙ du mot ΩΤΙΑ, au Ps. xl (xxxix), v. 6, étaient un peu douteuses ; il y a vu un Μ, et, comme le mot précédent finit par un Σ, il a lu σῶμα, ce qui lui fournit le beau sens messianique : « Tu n’as plus voulu de sacrifices ; mais tu m’as donné un corps ; alors j’ai dit : « Voilà que je viens[2]… »

Chose singulière ! la mort de Jésus prenait ainsi dans l’école de Paul une bien plus grande importance que sa vie. Les préceptes du lac de Géné-

  1. Il ne savait guère que le grec. Voir ses raisonnements sur διαθήκη, considéré comme équivalent de ברית.
  2. Hebr., x, 5.