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il n’avait pas à ce moment autour de lui sa brillante couronne de disciples, les détails de sa mort seraient restés inconnus ; plus tard, la légende y aurait suppléé, en tenant compte, d’une part, de la qualité de citoyen romain que les Actes lui donnent, de l’autre, du désir qu’avait la conscience chrétienne d’opérer un rapprochement entre lui et Pierre. Certes, une mort obscure pour le fougueux apôtre a quelque chose qui nous sourit. Nous aimerions à rêver Paul sceptique, naufragé, abandonné, trahi par les siens, seul, atteint du désenchantement de la vieillesse ; il nous plairait que les écailles lui fussent tombées une seconde fois des yeux, et notre incrédulité douce aurait sa petite revanche si le plus dogmatique des hommes était mort triste, désespéré (disons mieux, tranquille), sur quelque rivage ou quelque route de l’Espagne, en disant lui aussi : Ergo erravi ! Mais ce serait trop donner à la conjecture. Il est sûr que les deux apôtres étaient morts en 70 ; ils ne virent pas la ruine de Jérusalem, qui eût fait sur Paul une si profonde impression. Nous admettrons donc comme probable, dans toute la suite de cette histoire, que les deux champions de l’idée chrétienne disparurent à Rome, pendant l’orage terrible de l’an 64.

    ment Romain (Ad Cor. I, § 5) s’accommoderait aussi à quelques égards d’une telle hypothèse.