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lées de la sorte étaient faibles de corps[1] ; leur courage fut surhumain ; mais la foule infâme n’eut d’yeux que pour leurs entrailles ouvertes et leurs seins déchirés.

Néron fut sans doute présent à ces spectacles. Comme il était myope, il avait coutume de porter dans l’œil, quand il suivait les combats des gladiateurs, une émeraude concave qui lui servait de lorgnon[2]. Il aimait à faire parade de ses connaissances de sculpteur ; on prétend que sur le cadavre de sa mère il émit d’odieuses remarques, louant ceci, blâmant cela. Une chair palpitant sous la dent des bêtes, une pauvre fille timide, voilant sa nudité d’un geste chaste, puis soulevée par un taureau et mise en lambeaux sur les cailloux de l’arène, devaient offrir des formes plastiques et des couleurs dignes d’un connaisseur comme lui. Il était là, au premier rang, sur le podium[3], mêlé aux vestales et aux magistrats curules, avec sa mauvaise figure, sa vue basse, ses yeux bleus, ses cheveux châtains, bouclés en étages.

    filet à un taureau, et celui de sainte Perpétue et de sainte Félicité, exposées également, dans un filet à une vache furieuse. Lettre dans Eusèbe, H. E., V, 4 ; Martyrs d’Afrique, § 20.

  1. Clém. Rom., Ad Cor. I, c. 6.
  2. Pline, H. N., XXXVII, v (16).
  3. Suétone, Néron, 12.