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vertige. Il s’était formé une compagnie d’odieux espiègles, qu’on appelait les « chevaliers d’Auguste », ayant pour occupation d’applaudir les folies du césar, d’inventer pour lui des farces de rôdeurs de nuit[1]. Nous verrons bientôt un empereur sortir de cette école[2]. Un déluge d’imaginations de mauvais goût, de platitudes, de mots prétendus comiques, un argot nauséabond, analogue à l’esprit de nos plus petits journaux, s’abattirent sur Rome et y firent la mode[3]. Caligula avait déjà créé ce genre funeste d’histrion impérial. Néron le prit hautement pour modèle[4]. Ce ne fut pas assez pour lui de conduire des chars dans le cirque, de s’égosiller en public, de faire des tournées de chanteur en province[5] ; on le vit pêcher avec des filets d’or, qu’il tirait avec des cordes de pourpre[6], dresser lui-même ses claqueurs, mener de faux triomphes, se décerner toutes les couronnes de la

  1. Pline, H. N., XIII, xxii (43).
  2. Suétone, Othon, 2.
  3. Tacite, Annales, XIV, 14, 15, 16. Voir les mots de Néron dans Suétone, pour comprendre le genre de plaisanteries qu’il affectionnait. Cf. Tacite, Annales, XIV, 57 ; Dion Cassius, LXII, 14; LXIII, 8.
  4. Suétone, Néron, 30.
  5. Tacite, Ann., XV, 33 et suiv., Suétone, Néron, 20, 22, 24, 25.
  6. Eusèbe, Chron., an 6 de Néron.