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d’une façon qui suppose également que Marc n’était pas pour elles un inconnu[1]. La lettre se terminait par les souhaits d’usage. L’Église de Rome y est désignée par ces mots : « l’élue qui est à Babylone. » La secte était surveillée de près ; une lettre trop claire, interceptée, pouvait amener d’affreux malheurs. Afin de dépister les soupçons de la police, Pierre choisit pour désigner Rome le nom de l’antique capitale de l’impiété asiatique, nom dont la signification symbolique n’échappait à personne et qui allait bientôt fournir la donnée fondamentale d’un poëme tout entier[2].

  1. I Petri, v, 13. Cf. Col., iv, 10.
  2. I Petri, v, 13 ; Eusèbe, H. E., II, xv, 2. Comp. Apoc., xiv, 8 ; xvi, 19 ; xvii, 5 ; xviii, 2, 10, 21 ; Carmina sib., V, 142, 158 ; Midrasch Schir hasschirim rabba, i, 6 ; Commodien, Instr., acrost. xli, 12 ; Apocalypse d’Esdras, i, 1, 28, 32. Il est invraisemblable qu’il s’agisse, dans la Iª Petri, de Babylone sur l’Euphrate. Le christianisme, au ier siècle, ne s’étendit nullement vers la Babylonie. Peu d’années avant l’époque où nous sommes arrivés, les juifs avaient été chassés de Babylone, et même ils avaient dû abandonner Séleucie et Ctésiphon pour Néhardéa et Nisibe (Jos., Ant., XVIII, ix, 8, 9). Au IIIe siècle, il n’y a pas encore de minim à Néhardéa. Talm. de Bab., Pesachim, 56 a. Rien de plus commun chez les Juifs que ces noms symboliques : Esther, iii, 1, 10 ; viii, 3, 5 ; Apoc., xi, 8. C’est ainsi qu’ils ont quelquefois désigné Rome par Ninive (Buxtorf, Lex. chald., col. 221), l’empire romain par Edom, les chrétiens par Couthim, les Slaves par Chanaan. V. ci-dessus, p. 36.