Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.

méthode, trop accréditée en Allemagne, où l’on part d’un type a priori qui doit servir de criterium absolu pour l’authenticité des œuvres d’un écrivain ! Que l’interpolation et la supposition des écrits apostoliques aient été souvent pratiquées durant les deux premiers siècles du christianisme, on ne saurait le nier. Mais faire en pareille matière un strict discernement du vrai et du faux, de l’apocryphe et de l’authentique, est une tâche impossible à remplir. Nous voyons avec certitude que les épîtres aux Romains, aux Corinthiens, aux Galates sont authentiques. Nous voyons avec la même certitude que les épîtres à Timothée et à Tite sont apocryphes. Dans l’intervalle, entre ces deux pôles de l’évidence critique, nous tâtonnons. La grande école sortie de Christian Baur a pour principal défaut de se figurer les juifs du ier siècle comme des caractères entiers, nourris de dialectique, obstinés en leurs raisonnements. Pierre, Paul, Jésus même, ressemblent, dans les écrits de cette école, à des théologiens protestants d’une université allemande, ayant tous une doctrine, n’en ayant qu’une et gardant toujours la même. Or ce qui est vrai, c’est que les hommes admirables qui sont les héros de cette histoire changeaient et se contredisaient beaucoup ; ils usaient dans leur vie trois ou quatre théories ; ils faisaient des emprunts à