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plus oppressée, plus haletante qu’à ce moment. On se croyait en un état provisoire et de très-courte durée. On attendait chaque jour l’apparition solennelle. « Il vient !… Encore une heure !… Il est proche !… » étaient les mots qu’on se disait à tout instant[1]. L’esprit du martyre, cette pensée que le martyr glorifie le Christ par sa mort, et que cette mort est une victoire, était déjà universellement répandu[2]. Pour le païen, d’un autre côté, le chrétien devenait une chair naturellement dévolue au supplice. Un drame qui avait vers ce temps beaucoup de succès était celui de Laureolus, où l’acteur principal, sorte de Tartuffe fripon, était crucifié sur la scène aux applaudissements de l’assistance et mangé par un ours. Ce drame était antérieur à l’introduction du christianisme à Rome ; on le trouve représenté dès l’an 41 ; mais il semble au moins qu’on en fit l’application aux martyrs chrétiens ; le petit nom de Laureolus, répondant à Stéphanos, pouvait provoquer ces allusions[3].

  1. Phil., iv, 5 ; Jac., v. 8 ; I Petri, iv, 7 ; Hebr., x, 37 ; I Joh., ii, 18.
  2. Phil., i, 20 ; Jean, xxi, 19. Comp. l’expression τρόπαια dans Caïus, cité par Eus., H. E., II, 25.
  3. Suétone, Caius, 57; Juvénal, viii, 186 et suiv. ; Martial, Spectac., vii.