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pauté obstinée en son esprit étroit. Autour de lui, un nombreux parti, plus pharisien que chrétien, portait le goût des observances légales presque au même degré que les zélotes, et s’imaginait que le mouvement nouveau avait pour essence un redoublement de dévotion[1]. Ces exaltés se donnaient à eux-mêmes le nom de « pauvres », ébionim, πτωχοί, et s’en glorifiaient[2]. Il y avait bien quelques riches dans la communauté, mais ils étaient mal vus ; on les tenait pour aussi orgueilleux et aussi tyranniques que les sadducéens[3]. La fortune en Orient n’a presque jamais une source honnête ; de tout riche, on peut dire, sans beaucoup de chance d’erreur, que lui ou un de ses ancêtres a été conquérant, voleur, concussionnaire ou homme vil[4]. La liaison d’idées qui fait, surtout chez les Anglais, associer d’assez près l’honnêteté et la richesse, n’a jamais été le fait de l’Orient. La Judée, du moins, concevait les choses à l’inverse. Pour les saints de Jérusalem, « riche » était synonyme d’ « ennemi » et de « méchant[5] ». L’idéal de l’impie était à leurs yeux l’opulent sadducéen, qui les persécutait,

  1. Act., xxi, 20.
  2. Jac., ii, 5 et suiv.
  3. Jac., i, 10-11 ; ii, 1 et suiv. ; iv, 1 et suiv. ; v, 1 et suiv., 9.
  4. Se rappeler le mot de saint Jérôme : « Omnis dives aut iniquus est aut hæres iniqui. »
  5. Jac., ii, 1 et suiv.