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ment de défiance qu’éprouvaient les membres du vieux parti de Jérusalem devant le hardi missionnaire qui leur amenait des nuées de confrères nouveaux, sans titres de noblesse juive, devait être quelque chose d’analogue. Ils se voyaient débordés, et, au lieu de tomber aux pieds de Paul et de le remercier, ils voyaient en lui un perturbateur, un intrus qui forçait les portes avec des gens recrutés de tous les bords. Plus d’une parole dure fut, ce semble, échangée[1]. Il est vraisemblable que c’est à ce moment même que Jacques, frère du Seigneur, conçut le projet qui faillit perdre l’œuvre de Jésus, je veux dire le projet d’une contre-mission chargée de suivre l’apôtre des gentils, de contredire ses principes, de persuader à ses convertis qu’ils étaient obligés à se faire circoncire et à pratiquer toute la Loi[2]. Les mouvements sectaires ne se produisent jamais sans des schismes de ce genre ; qu’on se rappelle les chefs du saint-simonisme se reniant les uns les autres et néanmoins restant unis en Saint-Simon, puis récon-

  1. Épître de Jude, 8 et suiv.
  2. Gal., i, 7 ; ii, 12, etc. Comp. Act., xv, 1, 24. On montrera plus tard la suite de cette contre-mission dans les deux épîtres aux Corinthiens, et dans le rôle que l’auteur des Homélies pseudo-clémentines fait jouer à Pierre, rôle qui consiste à courir le monde sur les traces de Simon le Magicien pour contrecarrer sa prédication et réparer le mal qu’il fait. Voir surtout hom. ii, 17.