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plus personnel qu’il y ait jamais eu. La langue y est, si j’ose le dire, broyée ; pas une phrase suivie. Il est impossible de violer plus audacieusement, je ne dis pas le génie de la langue grecque, mais la logique du langage humain ; on dirait une rapide conversation sténographiée et reproduite sans corrections. Timothée se forma vite à remplir auprès de son maître les fonctions de secrétaire, et, comme sa langue devait un peu ressembler à celle de Paul, il le remplaça fréquemment. Il est probable que dans les Épîtres et peut-être dans les Actes nous avons plus d’une page de Timothée : telle était la modestie de cet homme rare que nous n’avons aucun signe certain pour les retrouver.

Même quand Paul correspondait directement, il n’écrivait pas de sa propre main ; il dictait[1]. Quelquefois, quand la lettre était finie, il la relisait ; son âme impétueuse l’emportait alors ; il y faisait des additions marginales, au risque de briser le contexte et de produire des phrases suspendues ou enchevêtrées[2]. Il envoyait la lettre ainsi raturée,

  1. Rom., xvi, 22. Les passages Philémon, 19, et Gal., vi, 11, n’impliquent pas que ces deux lettres fussent entièrement autographes ; ce seraient là, en tout cas, des exceptions.
  2. Par exemple, Rom., ii, 14-15 ; I Cor., viii, 1-3 ; Gal., ii, 6-7 ; vi, 1. Cf. Cic., Ad Att., V, 1. Pour se représenter l’aspect