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lien supérieur, l’amour que tous avaient pour Jésus, le souvenir dont tous vivaient, fut plus fort que les divisions. Le dissentiment le plus fondamental qui se soit jamais produit au sein de l’Église n’amena pas d’anathème. Grande leçon que les siècles suivants ne sauront guère imiter !

Paul comprit que, dans des assemblées nombreuses et passionnées, il ne réussirait jamais, que les esprits étroits y auraient toujours le dessus, que le judaïsme était trop fort à Jérusalem pour qu’on pût espérer de lui une concession de principes. Il alla voir séparément tous les personnages considérables, en particulier Pierre, Jacques et Jean[1]. Pierre, comme tous les hommes qui vivent surtout d’un sentiment élevé, était indifférent aux questions de parti. Ces disputes l’affligeaient ; il eût voulu l’union, la concorde, la paix. Son esprit timide et peu étendu se détachait difficilement du judaïsme ; il eût préféré que les nouveaux convertis eussent accepté la circoncision, mais il voyait l’impossibilité d’une telle solution. Les natures profondément bonnes sont toujours indécises ; parfois même elles sont en-

  1. Gal., ii, 2 et suiv. Le récit de Paul n’exclut pas la possibilité d’assemblées ; mais il exclut l’idée que l’affaire ait été traitée principalement dans une assemblée et ait été résolue par une assemblée.