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une folle[1]. Pierre et Jean, de leur côté, racontent ce qu’ils ont vu. D’autres disciples vont au tombeau et voient de même[2]. La conviction arrêtée de tout ce premier groupe fut que Jésus était ressuscité. Bien des doutes restaient encore ; mais l’assurance de Marie, de Pierre, de Jean s’imposait aux autres. Plus tard, on appela cela « la vision de Pierre »[3] ; Paul, en particulier, ne parle pas de la vision de Marie et reporte tout l’honneur de la première apparition sur Pierre. Mais cette expression était très inexacte. Pierre ne vit que le caveau vide, le suaire et le linceul. Marie seule aima assez pour dépasser la nature et faire revivre le fantôme du maître exquis. Dans ces sortes de crises merveilleuses, voir après les autres n’est rien : tout le mérite est de voir pour la première fois ; car les autres modèlent ensuite leur vision sur le type reçu. C’est le propre des belles organisations de concevoir l’image promptement, avec justesse et par une sorte de sens

  1. Luc, xxiv, 11.
  2. Ibid., xxiv, 24.
  3. Ibid., xxiv, 34 ; I Cor., xv, 5 ; la finale de Marc dans le manuscrit L. Le fragment de l’Évangile des hébreux, dans saint Ignace, Epist. ad Smyrn., 3, et dans saint Jérôme, De viris ill., 16, semble placer « la vision de Pierre » le soir, et la fondre avec celle des apôtres assemblés. Mais saint Paul distingue expressément les deux visions.