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noncer eux-mêmes, afin qu’on les adjoignît aux patients. Il est si doux à l’homme de souffrir pour quelque chose, que dans bien des cas l’appât du martyre suffit pour faire croire. Un disciple qui fut le compagnon de supplice du Bâb, suspendu à côté de lui aux remparts de Tébriz, et attendant la mort, n’avait qu’un mot à la bouche : « Es-tu content de moi, maître ? »

Les personnes qui regardent comme miraculeux ou chimérique ce qui dans l’histoire dépasse les calculs d’un bon sens vulgaire, doivent trouver de tels faits inexplicables. La condition fondamentale de la critique est de savoir comprendre les états divers de l’esprit humain. La foi absolue est pour nous un fait complètement étranger. En dehors des sciences positives, d’une certitude en quelque sorte matérielle, toute opinion n’est à nos yeux qu’un à peu près, impliquant une part de vérité et une part d’erreur. La part d’erreur peut être aussi petite que l’on voudra ; elle ne se réduit jamais à zéro, quand il s’agit de choses morales, impliquant une question d’art, de langage, de forme littéraire, de personnes. Telle n’est pas la manière de voir des esprits étroits et obstinés, des Orientaux par exemple. L’œil de ces gens n’est pas comme le nôtre ; c’est l’œil d’émail des personnages de mosaïques, terne, fixe. Ils ne savent voir qu’une