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liberté. La vie, la joie ne renaîtront dans le monde que quand notre défiance contre les collegia, ce triste héritage du droit romain, aura disparu. L’association en dehors de l’État, sans détruire l’État, est la question capitale de l’avenir. La loi future sur les associations décidera si la société moderne aura ou non le sort de l’ancienne. Un exemple devrait suffire : l’empire romain avait lié sa destinée à la loi sur les cœtus illiciti, les illicita collegia. Les chrétiens et les barbares, accomplissant en ceci l’œuvre de la conscience humaine, ont brisé la loi ; l’Empire, qui s’y était attaché, a sombré avec elle.

Le monde grec et romain, monde laïque, monde profane, qui ne savait pas ce que c’est qu’un prêtre, qui n’avait ni loi divine, ni livre révélé, touchait ici à des problèmes qu’il ne pouvait résoudre. Ajoutons que, s’il avait eu des prêtres, une théologie sévère, une religion fortement organisée, il n’eût pas créé l’État laïque, inauguré l’idée d’une société rationnelle, d’une société fondée sur les simples nécessités humaines et sur les rapports naturels des individus. L’infériorité religieuse des Grecs et des Romains était la conséquence de leur supériorité politique et intellectuelle. La supériorité religieuse du peuple juif, au contraire, a été la cause de son infériorité politique et philosophique. Le judaïsme et le