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d’honnêtes bourgeois de petites villes, plus charmant que celui que Plutarque nous a laissé ? Quelle bonhomie ! quelle douceur de mœurs ! quelle chaste et aimable simplicité[1] ! Chéronée n’était évidemment pas le seul endroit où la vie fût si pure et si innocente.

Les habitudes, même en dehors de Rome, avaient bien encore quelque chose de cruel, soit comme reste des mœurs antiques, partout si sanguinaires, soit par l’influence spéciale de la dureté romaine. Mais on était en progrès sous ce rapport. Quel sentiment doux et pur, quelle impression de mélancolique tendresse n’avaient pas trouvé sous la plume de Virgile ou de Tibulle leur plus fine expression ? Le monde s’assouplissait, perdait sa rigueur antique, acquérait de la mollesse et de la sensibilité. Des maximes d’humanité se répandaient[2] ; l’égalité, l’idée abstraite des droits de l’homme, étaient hautement prêchées par le stoïcisme[3]. La femme, grâce au système dotal du droit romain, devenait de plus en plus maîtresse d’elle-même ; les préceptes sur la manière

  1. Propos de table, I, v, 1 ; Vie de Démosth., 2 ; le dialogue de l’Amour, 2, et surtout la Consolation à sa femme.
  2. « Caritas generis humani, » Cic., De finibus, V, 23. « Homo sacra res homini, » Sénèque, Epist., xcv, 33.
  3. Sénèque, Epist., xxxi, xlvii ; De benef., III, 18 et suiv.