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savait à peine sa conversion, qu’il ait été présenté aux apôtres, qu’il ait vécu avec les apôtres et les fidèles sur le pied de la plus grande cordialité, qu’il ait disputé publiquement contre les Juifs hellénistes, qu’un complot de ceux-ci et une révélation céleste l’aient porté à s’éloigner de Jérusalem. Or, Paul nous apprend que les choses se passèrent très-différemment. Pour prouver qu’il ne relève pas des Douze et qu’il doit à Jésus lui-même sa doctrine et sa mission, il assure (Gal., i, 11 et suiv.) qu’après sa conversion il évita de prendre conseil de qui que ce soit[1] et de se rendre à Jérusalem vers ceux qui étaient apôtres avant lui ; qu’il alla prêcher dans le Hauran de son propre mouvement et sans mission de personne ; que, trois ans plus tard, il est vrai, il accomplit le voyage de Jérusalem pour faire la connaissance de Céphas ; qu’il resta quinze jours auprès de lui, mais qu’il ne vit aucun autre apôtre, si ce n’est Jacques, frère du Seigneur, si bien que son visage était inconnu aux Églises de Judée. L’effort pour adoucir les aspérités du rude apôtre, pour le présenter comme le collaborateur des Douze, travaillant à Jérusalem de concert avec eux, paraît ici avec évidence. On fait de Jérusalem sa capitale et son point

  1. Pour la nuance de οὐ προσανεθέμην σαρκὶ καὶ αἵματι, comp. Matth., xvi, 17.