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niers temps de la République n’avaient pas réussi à la rendre odieuse. La loi Julia, d’ailleurs, avait fort limité le champ des abus et des concussions. Les folies ou les cruautés de l’empereur, excepté sous Néron, n’atteignirent que l’aristocratie romaine et l’entourage immédiat du prince. Jamais l’homme qui ne veut pas s’occuper de politique n’avait vécu plus à l’aise. Les républiques de l’antiquité, où chacun était forcé de s’occuper des querelles de partis[1], étaient des séjours fort incommodes. On y était sans cesse dérangé, proscrit. Maintenant, le temps semblait fait exprès pour les prosélytismes larges, supérieurs aux querelles de petites villes, aux rivalités de dynasties. Les attentats contre la liberté venaient de ce qui restait encore d’indépendance aux provinces ou aux communautés, bien plus que de l’administration romaine[2]. Nous avons eu et nous aurons encore en cette histoire de nombreuses occasions de le faire remarquer.

Dans ceux des pays conquis où les besoins politiques n’existaient pas depuis des siècles, et où l’on n’était privé que du droit de se déchirer par des guerres continuelles, l’Empire fut une ère de prospé-

  1. Plutarque, Vie de Solon, 20.
  2. Voir Athénée, XII, 68 ; Élien, Var. Hist., IX, 12 : Suidas, au mot Ἐπίκουρος.