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moins souffrir[1]. Un autre jour, c’était une troupe de gamins, criant au scandale, parce que les Juifs seuls refusaient de placer la statue de l’empereur dans leurs lieux de prière ; on courait alors aux synagogues et aux oratoires ; on y installait le buste de Caligula[2] ; on mettait les malheureux dans l’alternative ou de renoncer à leur religion, ou de commettre un crime de lèse-majesté. Il s’ensuivait d’affreuses vexations.

De telles plaisanteries s’étaient déjà plusieurs fois renouvelées, quand on suggéra à l’empereur une idée plus diabolique encore ; ce fut de placer son colosse en or dans le sanctuaire du temple de Jérusalem, et de faire dédier le temple lui-même à sa divinité[3]. Cette odieuse intrigue faillit hâter de trente ans la révolte et la ruine de la nation juive. La modération du légat impérial, Publius Pétronius, et l’intervention du roi Hérode Agrippa, favori de Caligula, prévinrent la catastrophe. Mais, jusqu’au moment où l’épée de Chæréa délivra la terre du tyran le plus exécrable qu’elle eut encore supporté, les Juifs vécurent partout dans la terreur. Philon nous a con-

  1. Philon, Leg. ad Caium, § 30.
  2. Philon, In Flaccum, § 7 ; Leg. ad Caium, § 18, 20, 26, 43.
  3. Philon, Leg. ad Caium, § 29 ; Josèphe, Ant., XVIII, viii ; B. J., II, x ; Tacite, Ann., XII, 54 ; Hist., V, 9, en complétant le premier passage par le second.