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éclair ait amené un long éblouissement ; qu’un éclat de la foudre l’ait renversé et ait produit une commotion cérébrale, qui oblitéra pour un temps le sens de la vue, peu importe. Les souvenirs de l’Apôtre à cet égard paraissent avoir été assez confus ; il était persuadé que le fait avait été surnaturel, et une telle opinion ne lui permettait pas une conscience nette des circonstances matérielles. Ces commotions cérébrales produisent parfois une sorte d’effet rétroactif et troublent complètement les souvenirs des moments qui ont précédé la crise[1]. Paul, d’ailleurs, nous apprend lui-même qu’il était sujet aux visions[2] ; quelque circonstance insignifiante aux yeux de tout autre dut suffire pour le mettre hors de lui.

Au milieu des hallucinations auxquelles tous ses sens étaient en proie, que vit-il, qu’entendit-il ? Il vit la figure qui le poursuivait depuis plusieurs jours ; il vit le fantôme sur lequel couraient tant de récits. Il vit Jésus lui-même[3], lui disant en hébreu : « Saül, Saül, pourquoi me persécutes-tu ? » Les natures impétueuses passent tout d’une pièce d’un extrême à

  1. C’est ce que j’éprouvai dans mon accès de Byblos. Les souvenirs de la veille du jour où je tombai sans connaissance se sont totalement effacés de mon esprit.
  2. II Cor., xii, 1 et suiv.
  3. Act., ix, 27 ; Gal., i, 16 ; I Cor., ix, 1 ; xv, 8 ; Homélies pseudo-clémentines, xvii, 13-19.