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Le fabricateur des épîtres à Timothée, en effet, n’est sûrement pas le même que le fabricateur des épîtres aux Colossiens et à Philémon (en supposant, contrairement à notre opinion, que celles-ci soient apocryphes). Admettre qu’un faussaire eût attribué à Paul un compagnon imaginaire serait déjà peu vraisemblable. Mais sûrement des faussaires différents ne seraient pas tombés d’accord sur le même nom. Deux observations donnent à ce raisonnement une force particulière. La première, c’est que le nom de Lucas ou Lucanus est un nom rare parmi les premiers chrétiens, et qui ne prête pas à des confusions d’homonymes ; la seconde, c’est que le Lucas des épîtres n’eut d’ailleurs aucune célébrité. Inscrire un nom célèbre en tête d’un écrit, comme on le fit pour la deuxième épître de Pierre, et très-probablement pour les épîtres de Paul à Tite et à Timothée, n’avait rien qui répugnât aux habitudes du temps. Mais inscrire en tête d’un écrit un faux nom, obscur d’ailleurs, c’est ce qui ne se conçoit plus. L’intention du faussaire était-elle de couvrir le livre de l’autorité de Paul ? Mais, alors, pourquoi ne prenait-il pas le nom de Paul lui-même, ou du moins le nom de Timothée ou de Tite, disciples bien plus connus de l’apôtre des gentils ? Luc n’avait aucune place dans la tradition, dans la légende, dans l’histoire. Les trois