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tels que Philon et Josèphe. Les lois des autres peuples veillent à ce que la justice ait son cours ; peu leur importe que les hommes soient bons et heureux. La loi juive descend aux derniers détails de l’éducation morale. — Le christianisme n’est que le développement de la même idée. Chaque Église est un monastère, où tous ont des droits sur tous, où il ne doit y avoir ni pauvres ni méchants, où tous par conséquent se surveillent, se commandent. Le christianisme primitif peut se définir une grande association de pauvres, un effort héroïque contre l’égoïsme, fondé sur cette idée que chacun n’a droit qu’à son nécessaire, que le superflu appartient à ceux qui n’ont pas. On voit sans peine qu’entre un tel esprit et l’esprit romain il s’établira une lutte à mort, et que le christianisme, de son côté, n’arrivera à régner sur le monde qu’à condition de modifier profondément ses tendances natives et son programme originel.

Mais les besoins qu’il représente dureront éternellement. La vie commune, à partir de la seconde moitié du moyen âge, ayant servi aux abus d’une Église intolérante, le monastère étant devenu trop souvent un fief féodal ou la caserne d’une milice dangereuse et fanatique, l’esprit moderne s’est montré fort sévère à l’égard du cénobitisme. Nous avons oublié que c’est dans la vie commune que l’âme de l’homme