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de Kérioth avait laissé dans son sein[1]. L’opinion que ce dernier avait trahi son maître et avait été la cause de sa mort devenait de plus en plus générale. La légende s’en mêlait, et tous les jours on apprenait quelque circonstance nouvelle qui ajoutait à la noirceur de son action. Il s’était acheté un champ près de la vieille nécropole de Hakeldama, au sud de Jérusalem, et il y vivait retiré[2]. Tel était l’état d’exaltation naïve où se trouvait toute la petite Église, que, pour le remplacer, on résolut d’avoir recours à la voie du sort. En général, dans les grandes émotions religieuses, on affectionne ce moyen de se décider, car on admet en principe que rien n’est fortuit, qu’on est l’objet principal de l’attention divine, et que la part de Dieu dans un fait est d’autant plus grande que celle de l’homme est plus faible. On tint seulement à ce que les candidats fussent pris dans le groupe des disciples les plus anciens, qui avaient été témoins de toute la série des événements depuis le baptême de Jean. Cela réduisait considérablement le nombre des éligibles. Deux seulement se trouvèrent sur les rangs, José Bar-Saba, qui portait le nom de Justus[3] et Matthia. Le sort tomba sur Matthia, qui

  1. Act., i, 15-26.
  2. Voir Vie de Jésus, p. 437 et suiv.
  3. Comparez Eusèbe, H. E., III. 39 (d’après Papias).