Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 2 Les Apotres, Levy, 1866.djvu/111

Cette page a été validée par deux contributeurs.

vers consumaient-ils le corps inanimé qui avait été, le samedi soir, déposé au sépulcre ? On ignorera toujours ce détail ; car, naturellement, les traditions chrétiennes ne peuvent rien nous apprendre là-dessus. C’est l’esprit qui vivifie ; la chair n’est rien[1]. La résurrection fut le triomphe de l’idée sur la réalité. Une fois l’idée entrée dans son immortalité, qu’importe le corps ?

Vers l’an 80 ou 85, quand le texte actuel du premier Évangile reçut ses dernières additions, les Juifs avaient déjà à cet égard une opinion arrêtée[2]. A les en croire, les disciples seraient venus pendant la nuit et auraient volé le corps. La conscience chrétienne s’alarma de ce bruit, et, pour couper court à une telle objection, elle imagina la circonstance des gardiens et du sceau apposé au sépulcre[3]. Cette circonstance, ne se trouvant que dans le premier Évangile, mêlée à des légendes d’une autorité très-faible[4], n’est nullement admissible[5]. Mais l’explication des Juifs, quoique irréfutable, est loin de satisfaire à tout.

  1. Jean, vi, 64.
  2. Matth., xxviii, 11-15 ; Justin, Dial. cum Tryph., 17, 103.
  3. Matth., xxvii, 62-66 ; xxviii, 4, 11-15.
  4. Ibid., xxviii, 2 et suiv.
  5. Les Juifs sont censés, Matth., xxvii, 63, savoir que Jésus a prédit qu’il ressusciterait. Mais les disciples mêmes de Jésus n’avaient à cet égard aucune idée précise. Voir ci-dessus, p. 1, note.