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Un résultat incontestable de l’étude critique dont le livre a été l’objet dans les derniers temps, c’est qu’il fourmille de fautes de copiste. Or toutes ces fautes ont été commises dans l’alphabet hébreu moderne, qu’on appelle l’alphabet carré. Cet alphabet, qui est l’alphabet araméen lui-même, ou du moins qui est sorti de l’ancien alphabet par des modifications identiques à celles qui ont produit l’araméen[1], était l’alphabet en usage vers l’époque asmonéenne. Tout prouve que le Cohélet fut écrit et copié d’abord dans un alphabet très usé, très fatigué, avec des ligatures, où plusieurs lettres se ressemblaient, et qui présentait comme une série de traits verticaux se tenant entre eux et très faciles à confondre. On sent que le livre n’eut d’abord rien de sacré, rien d’officiel. Ce fut une écriture privée, longtemps gardée comme telle, copiée avec toutes les fautes qu’entraîne l’usage d’un caractère cursif.

La traduction grecque du Cohélet présente des caractères à part, qui invitent également à croire que le livre entra tard dans le Canon et y fut rattaché comme une sorte d’appendice. Si cette traduction n’est point d’Aquila, elle est au moins de son école et de sa manière. Aquila traduisit au temps d’Adrien (vers 130 après Jésus-Christ), et sous l’influence des idées de Rabbi Aquiba. Le principe fondamental de Rabbi Aquiba était que tout mot, dans le texte de la Bible, a une valeur par lui-même et ajoute une nuance au sens. Aquila en concluait que chaque mot

  1. Se le représenter par l'inscription des Beni-Hezir, près de Jérusalem, à peu près contemporaine de Jésus-Christ.