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la sagesse, savant paraboliste, curieux de toutes les choses de la nature. Ce sont là exactement les traits sous lesquels l’histoire et la légende présentent Salomon. Nul doute que l’auteur, qui sûrement connaissait Les Proverbes attribués aussi à Salomon, n’ait voulu mettre en scène le successeur de David. Ce roi célèbre lui a paru un personnage commode pour l’objet qu’il se proposait, c’est-à-dire pour montrer la vanité de toute chose. Salomon, ayant vu le sommet de la gloire et de la prospérité, a été mieux placé que personne pour découvrir le creux absolu de tous les mobiles de la vie humaine et la complète frivolité des opinions qui servent de base à la société.

L’auteur a-t-il voulu, comme tant d’autres, comme l’auteur alexandrin de La Sagesse, par exemple, attribuer un livre de plus à Salomon ? L’Ecclésiaste est-il un apocryphe, un des écrits de cette vaste littérature pseudépigraphe qui, de Judas Macchabée à Barkokeba, n’a cessé de se montrer féconde en productions variées ? Pas précisément. Quand un auteur juif des siècles qui avoisinent notre ère prenait, pour inculquer quelque forte pensée à ses contemporains, le manteau d’un ancien prophète ou d’un homme célèbre, tel que Moise, Hénoch, Baruch, Esdras, il prétendait bel et bien faire admettre sa prose comme l’œuvre de ces antiques personnages, et généralement on le croyait ; car aucune idée de critique littéraire n’existait alors. Telle n’est pas tout à fait l’intention de notre écrivain. L’auteur d’apocryphes est toujours un fanatique qui met son amour-propre de côté pour l’intérêt de sa cause. On voit clairement sa tendance