Page:Renan - Ecclesiaste - Arlea.djvu/70

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

moins aussi nombreuses que dans Job et Le Cantique, le caractère général et l’âge relatif du livre prêtent à moins de doutes. L’ouvrage compte certainement entre les plus modernes de la littérature hébraïque. Quant au caractère sceptique ou épicurien de la composition, on peut incidenter sur le sens précis de deux ou trois versets ; mais cela importe peu. Si l’auteur ne s’est pas tenu au scepticisme, il l’a traversé et en a donné la plus complète, la plus vive, la plus franche théorie. Or on ne se convertit guère du scepticisme ; on s’y endurcit justement par les efforts qu’on fait pour en sortir. Même celui qui réussit en apparence à y échapper en garde une empreinte ineffaçable, comme un fond de fièvre mal assoupie et toujours prête à se réveiller.

Le petit livre qui nous occupe porte en tête un mot bizarre de quatre lettres, QHLT, qui, pris en lui-même, n’a pas d’explication satisfaisante. C’est le nom même du personnage qui, dans tout le livre, tient la parole. Le livre, en effet, n'est pas autre chose qu’un discours, une sorte de confession, mêlée de conseils, que l’auteur place dans la bouche d’un certain QHLT, qu’il suppose avoir été fils de David et roi de Jérusalem[1]. On s’aperçoit bien vite que QHLT n’est qu’un mot de passe pour désigner Salomon. Il y a d’autres exemples de ces noms fictifs dans les livres sapientiaux[2] : QHLT, fils de David, a été un roi puissant, bâtisseur, jouisseur, livré aux femmes, au vin, à

  1. Comparez Prov, I, 1.
  2. Prov, ch. XXX et XXXL