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En reproduisant ce discours, c’est un devoir pour moi d’exprimer ma reconnaissance aux auditeurs bienveillants et éclairés qui m’ont aidé à le prononcer. Avec beaucoup de tact, ils ont compris que c’était ici une question de liberté. Interrompre un ouvrage d’esprit auquel on n’est pas forcé d’assister, me paraît toujours une action illibérale ; c’est s’imposer violemment à l’opinion d’autrui, c’est confondre deux choses profondément distinctes, le droit très-réel de distribuer le blâme selon son goût ou sa conscience, et le droit prétendu d’étouffer de sa propre autorité les idées que l’on croit blâmables. Qui ne voit que cette dernière prétention est la source de toutes les violences et de toutes les oppressions ? Dans l’enseignement du Collége de France, entouré de tant de garanties, cette suppression de la parole me semble particulièrement déplacée. La nomination des professeurs de cet établissement se fait sur la présentation de MM. les professeurs du Collége réunis en assemblée et de la classe compétente de l’Institut. Cette double présentation n’est point un brevet indiscutable. Mais elle suffit au moins pour que celui qui en est honoré ne puisse être accusé de téméraire intrusion, quand il monte dans une chaire à laquelle le désignent des suffrages si autorisés.

Je ne voudrais pas que la forme de cette première leçon trompât le public sur la nature de mon enseignement. Depuis Vatable et Mercier jusqu’à M. Quatremère, la chaire à laquelle j’ai eu l’honneur d’être présenté et nommé a offert un caractère technique et spécial. Sans enchaîner en aucune façon ma liberté ni celle de mes successeurs, je croirais rendre un mauvais service à la science en sortant habituelle-