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jamais à ce peuple, et qui le rend en un sens plus heureux que le nôtre, malgré son humiliation. Voilà le secret de ce laisser-aller et de cette insouciance qui parfois devient presque de la fierté, et constitue la vraie démocratie de ce pays.

L’étranger qui visite ce pays avec la préoccupation de son pays est choqué de la mendicité, qui se rencontre à chaque pas, et attristé de l’effroyable misère qu’elle semble supposer. Mais qu’il se détrompe : ces gueux n’en sont ni plus tristes ni plus malheureux ; cette façon de vivre assis au soleil, sur le chemin des stations pieuses, a sa poésie ; elle paraît ici une façon de vivre toute naturelle et tient à la fierté du peuple romain, qui ne veut pas cultiver la terre[1], et si le sort

  1. Les cultivateurs de ce pays viennent presque tous des Abruzzes.