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l’orgueil. À ce prix, je suis orgueilleux et je m’en félicite. Que Dieu me damne, s’il le veut, mais jamais il n’obtiendra de moi que je fasse volontairement une faute de critique, que je trouve vrai ce que je ne trouve pas vrai.

» L’homme vraiment humble, c’est le critique. Il ne croit avoir pour la vérité ni privilège, ni monopole ; il la cherche péniblement et le front baissé. Il recueille jusqu’au grain de sable qui pourrait en recéler quelque atome ; et quand il a trouvé ce qu’il cherche, il ne croit pas encore avoir trouvé, il est en soupçon contre lui-même, il ne cherche pas à imposer aux autres les délicats et imperceptibles aperçus auxquels il est arrivé. L’orgueilleux, c’est l’homme tout d’une pièce, prétendant tenir entre ses mains le mot définitif de ce qui est et la règle inflexible du meilleur.