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— J’y pense toujours.

— Plus assez ! Vous n’épouserez jamais votre tante, monsieur, c’est moi qui vous le dis, à moins que vous ne suiviez mes conseils.

— Quoi ! Quels conseils ? Il faut d’abord que Mlle Bernier ne parte pas demain, ni un autre jour.

— Cela, j’en fais mon affaire, pourvu que monsieur me donne sa parole d’adopter mon plan à propos de Mme de Fressantel. Si vous voulez le suivre, dans un mois vous serez son mari.

— Encore me faudrait-il savoir !…

— Non ! maintenant que je vous sais amoureux, je me méfie de vous.

— Et Sarah ne partira pas demain ?

— Ni demain, ni de longtemps.

— Alors fais comme tu voudras !

— Je demanderai alors à monsieur la permission de m’asseoir à son bureau pour écrire une lettre à mon tour.

Et sans attendre la réponse de son maître, il s’installa, attira à lui une feuille de papier et traça les lignes suivantes, d’une écriture et d’une orthographe qui prouvaient que les mois d’école que le vaurien devait à sa tante n’avaient pas été tout à fait perdus :


« Monsieur,

« La personne qui vous a fait voler chez vous, dans la nuit du 17 au 18 mars, la correspondance de Mme de Rennepont est Mme Bernier. »


— Comment, c’est Sarah ! s’écria Gaston qui, par-dessus l’épaule de son valet de chambre, avait lu cette étrange révélation.

— Elle-même, monsieur.

— Comment le sais-tu ?

— Ah ! ceci, est mon secret d’État. Mettons ma lettre sous enveloppe : « À monsieur Armand de Serville, 124, rue d’Assas. » Là, parfait ! Je vais maintenant faire porter le poulet, car je ne puis y aller moi-même, monsieur le comprend.

— Mais, malheureux, M. de Serville tuera son ancienne maîtresse.

— Ça, c’est bien possible, quoique nous ne lui en demandions pas autant. Aux grands maux les grands remèdes ! À moins que monsieur ne préfère manquer son mariage.

— Non, va ! Ah ! tu iras loin, mon garçon !