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Mais, parvenue au rez-de-chaussée et au moment où elle allait traverser le vestibule, elle s’arrêta brusquement.

Elle était en face de l’abbé Colomb qui sortait du cabinet de travail de M. de Ferney. Depuis la mort de Mme de Ferney, c’était la première fois qu’elle l’apercevait à l’hôtel.

Ayant appris l’enlèvement de Berthe, le digne prêtre avait guetté le retour du malheureux père pour lui offrir ses consolations.

Les regards de l’homme de paix et de l’épouse chassée se rencontrèrent.

Le ministre de Dieu semblait se trouver là, sur le passage de la coupable, comme pour lui faire comprendre que son châtiment venait d’en haut.

— Priez, madame, et repentez-vous, lui dit-il, en lui montrant le ciel. Dieu pardonne à ceux qui l’implorent !

Jeanne ne répondit que par un cynique sourire et s’élança vers la porte de la rue, en murmurant :

— Ah ! prêtre maudit, ce dont je suis certaine, c’est que je n’oublierai ni vos traits ni votre nom. Puisque vous parlez de Dieu, faites qu’il ne vous remette jamais sur mon chemin !

Une voiture, sur laquelle on avait déjà chargé ses malles, était devant l’hôtel : elle y bondit.

— Où va madame ? lui demanda miss Brown qui l’avait suivie.

— Rue d’Assas, 124, répondit Mme de Ferney d’une voix stridente.

Avant de s’éloigner pour jamais de son mari, la fille Méral lui jetait pour dernier outrage l’adresse de son amant !


XIII

Expiation.



Pendant que la triste héroïne de ce drame retombait dans la fange d’où la main d’un honnête homme l’avait arrachée, ce même honnête homme se livrait au plus profond désespoir.

Les saintes exhortations et les conseils de l’abbé Colomb n’avaient que momentanément calmé M. de Ferney.