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grand nombre de déserteurs de la Faculté s’occupassent de ses affaires, et il était convaincu que les ordonnances de tous ces médecins qui siègent dans le Parlement sont plus dangereuses encore pour le pays que celles de juillet 1830 ne l’ont été pour la royauté.

Bernel avait, d’ailleurs, la physionomie de son caractère, avec ses cheveux roux plantés dru et coupés court, sa barbe en pointe, son sourire railleur et son accent sardonique. Il n’en était pas moins charitable pour les malheureux et doux pour ses clients, les femmes, en particulier, qu’il traitait autant par le raisonnement que par le codex, ayant à leur endroit, non pas l’opinion de Michelet, qu’elles sont des malades dont l’homme doit être l’infirmier, mais les donnant comme des enfants nerveux, le plus souvent inconscients, qu’un conte de fée suffit parfois à calmer, dont il faut prévoir les écarts et les mauvais tours, et défendre contre elles-mêmes, afin d’avoir moins d’occasions de les châtier ou de leur pardonner.

Après le docteur Bernel, ou plutôt sur le même pied que lui, Mme  Bertin prenait place dans les affections de Ronçay. Le récit des chagrins de l’excellente femme lui avait donc causé la plus profonde émotion, et il allait certainement s’efforcer de la consoler, lorsque, sans lui laisser prendre la parole, elle ajouta vivement :

— Et si vous saviez quelle adorable créature ces deux hommes ont ainsi sacrifiée ! Bonne, instruite,