Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/85

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ractère aussi bien que de son tempérament, et il ne lui avait jamais fait la moindre observation.

Elle gouvernait bien sa maison, était économe, soignait son fils, observait les coutumes anglaises, sortait fort rarement, surtout depuis que sa mère avait quitté Londres. Il n’en demandait pas davantage, semblable en cela à ceux dont il s’était approprié les mœurs et les façons de penser relativement aux femmes.

La résolution que prenait si subitement la sienne lui parut donc un acte de folie, pas autre chose. Il n’y avait là rien de grave, il lui suffirait d’un mot pour la ramener à la raison. Du moins, il en était convaincu. Dans ce but il partit aussitôt pour Paris, mais en y arrivant, au lieu de se rendre directement rue d’Assas, il courut chez son beau-père.

M. Noblet n’avait pas fait en route son examen de conscience ; il ne s’était pas dit qu’au lendemain de la quarantaine, il avait épousé une enfant de moins de seize ans, élevée dans un tout autre monde que le sien et avec des aspirations qu’il n’avait pu satisfaire. Il ne s’était pas même rappelé que son mariage avait été un véritable et honteux marché, auquel n’aurait peut-être jamais consenti celle qui en avait été l’objet, si elle en avait eu connaissance. Cependant, comme il était doux et se savait faible, il avait senti, inconsciemment, qu’un auxiliaire lui était indispensable pour avoir raison de celle dont le caractère lui apparaissait, vaguement encore, tout autre qu’il ne l’avait jugé.