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déjà bien ; je t’aime encore davantage. T’avoir ainsi sacrifiée, ma jolie petite madone ! Ah ! les misérables, les monstres !

Elle relevait les cheveux de sa nièce pour couvrir son front de baisers, prenant sa tête entre ses mains pour la regarder de plus près ; puis elle l’embrassait encore fiévreusement, sentant son cœur s’ouvrir tout grand à un saint amour qu’elle n’avait jamais ressenti et répétant :

— Ma mignonne, ma chérie, ne pleure plus ! Ta vieille tante ne veut plus que tu pleures ! Nous vivrons ici ensemble ; nous ne nous quitterons pas !

— Et mon fils ? fit Mme Noblet avec un sourire navrant. Ai-je le droit d’en priver son père ? Ah ! si je ne l’avais pas, comme il y a longtemps que je serais morte !

— Ton fils ? Eh bien ! nous le garderons, le chérubin ! nous l’aimerons, le soignerons, en ferons un homme, oh ! pas comme les autres. Est-ce qu’un enfant n’appartient pas d’abord à sa mère ! Sais-tu ce qu’il faut faire ? Tu vas écrire à ton mari une lettre bien calme, bien digne, bien polie. Tu lui rappelleras qu’il t’a épousée sans ton consentement ; tu lui diras que tu ne peux pas le souffrir… Non, non, pas cela, je suis folle… mais que tu n’étais pas née pour être mariée ; que tu as beaucoup de respect pour lui et qu’il doit comprendre, par dignité, que tu ne peux plus vivre avec lui. Voyons, il doit avoir des défauts, M. Noblet, des vices ; tous les hommes en ont ; oh ! excepté M. Bertin qui était, lui, un être exceptionnel.