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avait transformé les communs en ateliers, était gaiement habitée, et là, dans un milieu jeune, un peu bruyant même parfois, mais cela ne déplaisait pas à son caractère essentiellement bon et indulgent, Mme Bertin vivait entourée du respect de tous, grâce au rôle bienfaisant qu’elle avait joué, trois années auparavant, auprès de l’un de ses voisins, Gilbert Ronçay, sculpteur de grand avenir.

En revenant d’Italie, où il était allé en qualité de prix de Rome, Ronçay était tombé gravement malade, et comme il n’avait pas de famille en France — il était créole de Bourbon — et n’avait non plus ni femme ni maîtresse pour le soigner, la tante d’Éva lui avait envoyé sa vieille domestique, Catherine ; puis elle était venue le voir et avait aidé beaucoup à sa guérison.

Il s’en alors suivi, entre elle et l’artiste, des rapports affectueux qui, naturellement, avaient donné le ton à la conduite des autres locataires de la maison envers l’excellente femme.

Mme Bertin n’avait donc jamais songé à quitter le quartier, et il se trouvait que la chambre occupée jadis par ses deux nièces, à l’époque où son beau-frère, condamné et saisi, avait dû s’enfuir de Paris, était restée la même. Peut-être avait-elle eu le pressentiment que les pauvres enfants s’y réfugieraient un jour de nouveau. Elle y installa Éva pour qui elle avait toujours éprouvé une tendresse maternelle.

Pendant les premiers jours de cette cohabitation,