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seras devenue plus sage et comprendras mieux tes devoirs envers ton mari et envers moi !

Et, sur ces mots, cet homme, que l’égoïsme et l’orgueil avaient rendu mauvais époux et mauvais père, se sépara, sans l’embrasser, sans même lui tendre la main, de son enfant dont le cœur bondissait d’indignation.

Cependant, Éva ne voulait pas retourner immédiatement à Londres. Assaillie par mille pensées diverses ; tantôt aspirant à la liberté, résolue à la révolte contre le lien conjugal qui lui était odieux ; tantôt revenant à la résignation, décidée à ne pas mettre un terme au sacrifice de sa jeunesse, elle désirait se recueillir pendant quelques jours avant de prendre un parti, et comme elle ne pouvait demeurer une heure de plus sous ce toit si peu paternel, où, seule, sa tendresse pour sa mère l’avait ramenée, elle alla demander l’hospitalité à sa tante.

Elle savait l’accueil que celle-ci lui réservait.

Veuve d’un universitaire qui, loin d’avoir gaspillé sa dot, ainsi que M. de Tiessant avait fait de celle de sa femme, était mort en laissant au contraire à la sienne une petite fortune, Mme  Bertin, bien qu’elle n’eût pas d’enfants, avait conservé, au 120 de la rue d’Assas, l’appartement de son mari, appartement trop vaste pour elle, mais où la retenaient ses habitudes et ses souvenirs.

Ses fenêtres donnaient sur le Luxembourg et recevaient les premiers rayons du soleil levant ; la maison, vieil hôtel aristocratique, dont le propriétaire