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genterie, ses bijoux, sa garde-robe et celle de ses filles. Les huissiers ne respectèrent que la bibliothèque de l’écrivain et les lits. Tout le reste fut vendu et, sur l’ordre exprès de son mari, Mme  de Tiessant dut le rejoindre en Angleterre.

Elle partit en confiant Blanche et Éva à Mme  Bertin qui, pleine de bon sens, avait, seule de la famille, pressenti comment se terminerait un jour la lutte de son beau-frère contre les innombrables ennemis qu’il s’était faits. Elle avait bien hasardé, çà et là, quelques conseils, mais le fougueux publiciste l’avait priée de s’occuper de ses affaires. Il avait même fini par lui fermer tout à fait sa porte.

L’excellente femme, veuve et sans enfants, n’en accueillit pas moins affectueusement ses nièces, que ce changement de situation étonnait plus encore qu’il ne les épouvantait, car elles ne se rendaient pas bien exactement compte de ce qui se passait, et les deux jeunes filles vivaient chez leur tante, rue d’Assas, depuis un mois à peine, lorsqu’une horrible nouvelle vint un jour leur ouvrir les yeux. Leur frère s’était tué à Rome.

Travailleur, un peu sombre, ambitieux et exalté, Robert avait pensé que la condamnation de son père pour outrages envers le chef de l’État serait à jamais un obstacle à son avancement, et il s’était donné la mort.

Ce suicide avait causé une grande émotion dans l’armée, et le sang de son fils avait en quelque sorte rejailli sur le pamphlétaire, car on ne doutait pas