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souffrance qu’un grand amaigrissement. Sa physionomie était redevenue tout à fait paisible, et ses lèvres, rapprochées par la pression du ruban de satin blanc que la brave Bretonne lui avait passé sous le menton, semblait sourire. Sur une petite table de Chine, une branche de buis trempait dans l’eau bénite que contenait un brûle-parfum en argent. Le crucifix d’ivoire enlevé à la couchette de l’enfant reposait entre les mains de la mère, devenues diaphanes. Ses lourds cheveux noirs étaient épars sur les oreillers de dentelles ; des roses blanches couvraient le lit. Le rêve de Mlle  de Tiessant était réalisé ; elle était belle même dans son linceul ; morte, Gilbert l’aimait encore !

Le soir, Bernel obtint de Ronçay qu’il prît quelques instants de repos, mais le lendemain matin, il était déjà debout depuis longtemps, lorsque le fourgon des Pompes funèbres s’arrêta devant la grille du bord de l’eau ; et quand les porteurs arrivèrent avec le coffre au pied du perron, il n’hésita pas un instant à les suivre au rez-de-chaussée, où stoïquement, ne permettant à aucun étranger de toucher à la chère morte, il la mit doucement dans sa bière, aidé seulement de Raymond et de Jeanne, car Mme  Bertin s’était affaissée, sans force, dans un fauteuil.

Les nombreux amis qui n’avaient pas voulu attendre le corps à Paris, mais étaient venus à Nogent, restaient, eux, discrètement dans le jardin. Il y avait là, non seulement M. Mansart, le vieil avocat de Mme  Noblet, mais encore l’un des maîtres les plus