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avec vous ou plutôt les prendre toutes pour moi !

— Eh bien ! soit ! fit soudain la malheureuse en devenant d’une pâleur mortelle, comme si la décision qu’elle venait de prendre lui eût fait affluer tout le sang au cœur. Soit ! Puisque tu le veux ! Mais ferme les fenêtres, les portes ! Qu’on ne m’entende pas. Si on m’entendait, je mourrais de honte !

Jeanne fit ce qui lui était commandé et revint prendre sa place auprès de la chaise longue.

Aussitôt, rapidement, à voix basse, comme cédant à une sorte de vertige, Éva commença à lui dire de telles choses que la jeune fille eut tout d’abord un mouvement de stupeur et que le rouge lui monta au front.

Alors Mlle  de Tiessant s’arrêta, mais, sa brave servante l’ayant rassurée par une pression de main, elle poursuivit bien vite, et lorsqu’elle eut terminé sa confidence, confidence douloureuse, horrible sans doute, car celle qui parlait, haletante, et celle qui écoutait, étrangement troublée, n’osaient en quelque sorte se regarder, lorsqu’elle eut terminé, la pauvre affolée gémit dans une prière, en se voilant le visage de ses mains :

— Crois-tu qu’il faut que je souffre pour en être arrivée là ! N’est-ce pas épouvantable d’oser te demander un pareil sacrifice ? Tu refuses, n’est-ce pas ? Tu refuses ? Ah ! pardonne-moi !

— Non, ma chère maîtresse, répondit la jolie Bretonne avec un adorable accent de dévouement, non, je ne refuse pas. J’étais prête à vous donner ma vie !